Budget : d’autres choix sont possibles !
Déclaration de Dominique Dellac lors du Débat d’Orientations Budgétaires, Conseil municipal du mercredi 19 janvier 2022.
« Monsieur le maire,
Le désaccord fondamental que nous exprimons chaque année avec vos orientations budgétaires vous est connu. La même politique engendrant les mêmes appréciations, nos critiques ne vous surprendront donc pas.
Nous pourrions partager avec vous certains constats concernant la politique nationale à l’égard des collectivités locales et plus particulièrement des communes.
Nous pourrions condamner les suppressions de la taxe professionnelle par le gouvernement Sarkozy et de la taxe d’habitation par celui de Macron. Suppressions qui portent atteinte à la libre administration des communes pourtant garantie par la Constitution.
En ce qui concerne la taxe professionnelle, cette suppression n’a eu que peu de conséquences pour notre commune, tant l’activité économique y est faible et votre politique indigente en la matière.
Par contre, même plafonnée à 10,5 millions d’euros, la compensation de la taxe d’habitation reste très conséquente puisque calculée sur une période où elle avait atteint des sommets à Montfermeil, notre ville étant sur le podium des villes les plus imposées de Seine-Saint-Denis.
Nous critiquons également le regroupement autoritaire des communes opérés par l’Etat avec la création des Métropoles et des Etablissement public territoriaux, qui encadrent la baisse des dotations d’Etat aux collectivités territoriales pour les contraindre à pratiquer des politiques austéritaires de baisse de la dépense publique. Effectivement, cette redéfinition des compétences et des ressources entre les différentes strates du mille-feuille institutionnel va se traduire cette année pour notre commune par une perte de 1,4 millions d’euros de DGF (page 26), qui ne sera que partiellement compensée à hauteur de 0,5 millions par les mécanismes de péréquation entre la Métropole du Grand Paris, l’EPT Grand Paris Grand Est et notre commune (page 25).
Nous pourrions partager ces constats si vous n’appliquiez pas depuis des années la même politique que celle de l’Etat. Une politique ultra libérale de réduction de la dépense publique dans un contexte de crise économique structurelle, encore aggravée ces 2 dernières années par la pandémie.
Là où l’Etat réduit ses budgets pour la Santé, l’Education, le Logement ; là, où depuis des années, il supprime massivement des d’infirmiers, des enseignants, vous lui emboitez le pas avec une politique de services publics à minima, de sous-investissement et de réduction des emplois communaux.
Des budgets de fonctionnement à minima
Malgré une épargne de fonctionnement brute de 10,6 millions d’euros (page 7), vous n’investissez toujours pas dans les services rendus à la population, vous flattant de maintenir vos dépenses de fonctionnement au même niveau que l’année dernière en tenant compte d’une inflation à 3%.
Cette épargne brute hors normes (20% des recettes de fonctionnement, alors que les organismes financiers estiment qu’un bon ratio est de 8%), qui correspond à des recettes non dépensées en fonctionnement, devrait vous permettre non pas une politique « contenue » (pour vous citer), mais une politique sociale, culturelle, sportive… sinon ambitieuse, au moins équivalente de celles des autres villes de 30 000 habitants d’Île-de-France.
Mais nous avons vainement cherché la politique sociale municipale dans vos grandes orientations énoncées dans votre rapport d’orientation budgétaire : rien, pas une ligne. Une absence qui en dit long sur votre rapport à la population de notre commune. Une population caractérisée par des indicateurs de pauvreté et de précarité très lourds :
- 13% des habitants allocataires du RSA et 23% des ménages allocataires des minima sociaux ;
- Un revenu mensuel médian de 1 440 euros et 48% des ménages non imposés sur le revenu ;
- 2 000 demandeurs d’emplois soit 15 % de la population active ;
- 42% des collégiens boursiers.
Une absence qui ne nous étonne pas, quand vous refusez toujours d’adopter de nouveaux quotients familiaux pour avoir des tarifs de restauration scolaire ou de centres de loisirs adaptés aux possibilités financières de toute la population dans sa diversité.
Quand vous refusez de soutenir les associations de solidarité qui œuvrent à limiter les souffrances d’une part importante des Montfermeillois et des Montfermeilloises.
Il ne suffit pas de phrases ronflantes pour, je vous cite, « permettre à tous les Montfermeillois de développer leurs talents à travers l’éducation, la culture et le sport ». Les enseignants, les parents d’élèves, les sportifs, les hommes et les femmes de culture savent que la politique municipale est particulièrement pauvre dans ces domaines.
Il ne suffit pas de vouloir « une ville belle, propre, sûre » pour qu’elle le soit. L’état de malpropreté chronique et de dégradation de notre voirie est une honte pour notre ville.
Au total, une politique de service public non pas « prudente » mais austéritaire, dont les principales victimes sont ceux et celles qui ont le plus besoin des services publics.
Des investissements ne permettant pas de résorber le sous équipement de notre ville
Il en va de même avec l’investissement. Vous vous contentez pour l’essentiel de travaux de restructuration et de rénovation dans les écoles et de déménagement de services municipaux.
Alors que durant la période 2017/2019, la rénovation urbaine et les financements de l’ANRU, de la Région et du Département (1 milliards d’euros) vous ont obligé à augmenter vos investissements jusqu’à 23 millions en 2018 (page 35), vous renouez avec votre politique passée de sous équipement.
Pourtant, le faible niveau de la dette, avec un taux de désendettement de 3,7 ans (page 7), pourrait vous permettre une politique d’investissement beaucoup plus ambitieuse, à la hauteur des besoins en équipements non satisfaits de notre ville, qui vont encore grandir avec l’accroissement de la population. En effet, vous annoncez l’ouverture de « 16 chantiers d’habitations » (page 67) dans les 2 ans à venir, qui s’ajouteront aux 490 logements autorisés ces 3 dernières années. Ce qui va rendre d’autant plus indispensable la construction d’un 3ème collège à Montfermeil dont le Département est prêt à financer la construction, mais pour lequel vous refusez de céder un terrain. Ce n’est certainement pas la situation financière de notre commune et de sa dette qui vous en empêche.
La suppression massive des emplois communaux
Depuis 2014, vous avez supprimé 87 emplois, le nombre d’ETP passant de 584 à 497(page 88). C’est une saignée considérable dans l’emploi communal et autant de possibilité d’emplois en moins pour les Montfermeillois. Ces suppressions affectent très majoritairement les catégories C, les premiers de corvée. Evidemment, ces suppressions s’accompagnent du discours habituel sur la nécessaire maîtrise des dépenses de personnels, la modernisation des services et la mutualisation des fonctions… Mais vous ne nous ferez pas croire qu’on peut améliorer le service rendu à la population et améliorer les conditions de travail des agents municipaux en supprimant 15% des effectifs.
Au total, Monsieur le maire, ce rapport d’orientation budgétaire fait une fois de plus la démonstration que Montfermeil dispose des moyens pour faire une autre politique. Une politique d’équipements et de service publics dignes d’une ville de 30 000 habitants.«
Image mohamed_hassan / Pixabay